Le PLU, créé en 2006 et mis à jour chaque année depuis, doit être remplacé en 2024 par un nouveau document censé réparer les échecs suivants :
les enjeux de végétalisation: l'objectif de 10 m²/habitant d'espace vert public n'a pas été atteint (8,6 m²/ha aujourd'hui). "Il aurait fallu faire quatre fois plus que ce qui a été réalisé sur les quinze dernières années ".
la baisse de la population qui est due à plusieurs facteurs: "la part des logements inoccupés (264 074 au lieu de 210 000 en 2000), la baisse de la valeur du ménage moyen (1,87 aujourd'hui)"
le pourcentage de logements sociaux: "actuellement il est de 22 %, la loi SRU exigerait 25 %, la majorité municipale souhaite atteindre 30 %. Pour atteindre cet objectif sur la décennie actuelle, il faudrait accorder les permis de 9700 LS supplémentaires par an alors que seulement 2700 m² ont été livrés en 2020."
l’accroissement du déséquilibre entre activités et habitat que le PLU de 2006 était censé corriger au profit de ce dernier: "sur les quinze années d'application du PLU il a été construit 3 M de m² d'activités contre 2,5 M de m² résidentiels."
Le point n°2 (augmentation de logements vides) s'explique vraisemblablement par leur usage en hébergements "airbnb", plus nombreux en 2018 qu'en 2000. Ils sont utiles pour accueillir des touristes, et ce ne peut être considéré comme un échec quand par ailleurs la mairie se flatte que Paris soit la première destination touristique au monde.
Le point n°3 semble inaccessible, pourquoi en parler ?
Le point n°4 est lui aussi paradoxal au regard des retombées économiques des activités hébergées à Paris.
Le point n°1 illustre bien en quoi une approche seulement statistique rend mal compte de la problématique de "Paris ville dense et peu végétalisée".
Le point de départ est cette norme de 10 m² d'espace vert par habitant.
Ce chiffre vient d'une circulaire de 1973 de l'OMS qui recommande pour les espaces de proximité l'affectation suivante :
1 - Jardins d’enfants (enfants de moins de 4 ans) : par enfant, 2 m², soit par habitant : 0,2 m² (les groupes de 0 à 4 ans, 5 à 9 ans, 10 à 14 ans, 15 à 19 ans représentent chacun environ 8% de la population française totale).
2 - Jardins d’enfants (enfants de 4 à 10 ans) : par enfant, 8 m², soit par habitant : 0,80 m².
3 - Plaines de jeux (enfants au-dessus de 10 ans et adolescents jusqu’à 20 ans) : par utilisateur, 20 m², soit par habitant : 4 m².
4 - Promenade et repos des mères de familles : par utilisatrice, 0,50 m².
5 - Promenades des adultes et vieillards : par utilisateur, 4 m².
6 - Aires sablées pour jeux libres : par utilisateur, 0,50 m².
Total 10 m².
La circulaire se termine ainsi:
Il est donc possible de dire que pour les seuls parcs et jardins publics,c’est à dire à l’exclusion des plantations d’alignement et d’accompagnement, des divers terrains de sports, des jardins spécialisés comme zoos, et enfin des forêts urbaines» il faudrait prévoir et réaliser l’aménagement d’environ 10 m² par habitant. Cet objectif est valable uniquement pour les espaces verts urbains et espaces de proximité.
Pour les espaces de fin de semaine, en tenant compte des forêts urbaines, des espaces péri-urbains forestiers et boisés, on a retenu un objectif de 25 m².
On lira avec beaucoup d'intérêt l'étude du Réseau français des Villes-Santé de l'OMS disponible en téléchargement libre ici . (79 pages)
Autant dire que l'objectif de 10 m² affiché par la mairie ne rend absolument pas compte de la qualité attendue de ces espaces verts.
Dans l'affirmation "les parisiens disposent de 8,6 m² par habitant" il y a donc un gros mensonge, car en réalité les parcs et jardins parisiens ont une superficie de 584 ha, soit 2,65 m² par habitant d'espaces verts de proximité.
Le bois de Vincennes (995 ha), et dans une moindre mesure celui de Boulogne (845 ha), appartiennent plus à la métropole du Grand Paris qu'à Paris intra-muros. Vis-à-vis de la majorité des Parisiens, ils sont des espaces péri-urbains forestiers et boisés. A ce titre ils apportent 8,34 m² par habitant d'espace boisé périurbain, inférieur à la recommandation de 25 m²/hab.
Conclusion évidente :
Paris, cinq ou sixième grande-ville la plus dense au monde ne répondra jamais à cette norme hygiénique. Seule une vision périphérique et partagée par d'autres villes de l’Île-de-France est susceptible de pallier ce handicap historique à une échelle métropolitaine. Londres est quinze fois plus étendu que Paris, Berlin neuf fois, Munich trois fois. Il faut donc raisonner à l'échelle de l'unité urbaine de Paris, soit 123 communes de la petite couronne et 286 communes de la grande couronne qui forment un territoire défini par la continuité du bâti.
Le rôle de la mairie de Paris est de créer sur son territoire des espaces verts de proximité répondant aux six usages identifiés par l'OMS, ce qu'elle ne fait pas par exemple dans une ZAC comme celle de Saint Vincent de Paul (14° ardt) où elle aménage des "rues-jardins" pour les mille cinq cents futurs habitants, et entretenir sérieusement les squares et petits jardins existants, ce qui exclut de les dénaturer comme elle tente de le faire boulevards Richard-Lenoir et Jules-Ferry.
Enfin la politique de réaménagement de sites historiques emblématiques comme l'avenue Foch ou le Champ de Mars-Tour Eiffel-Trocadéro doit être abandonnée définitivement.
Sur le PLU bioclimatique et son incidence sur l'architecture
Greffé au règlement général, l'Urbascope est une nouveauté. Il définit un nouveau cadre d’attribution d’un permis de construire, prenant en compte de nombreux critères comme le taux de végétalisation, le confort d’été ou la diversité des fonctions urbaines. Ce dispositif souhaite inciter à la "valorisation des externalités positives". Ce mécanisme est traduit par un dispositif réglementaire dans le PLU conditionnant la délivrance des autorisations d’urbanisme au même titre que les autres dispositions du règlement du PLU. Un label sera aussi annexé au PLU et permettra d’établir une note globale aux projets.
Les projets seront évalués sur trois thématiques (nature en ville et biodiversité; destinations vertueuses ; sobriété et efficacité) lesquelles contiennent chacune trois critères.
Pour obtenir le permis de construire, les projets devront atteindre un seuil de performance majoré sur trois des neuf critères, dans au moins deux thématiques.
Cette grille d'évaluation contient six critères quantitatifs, trois déjà régis par les règles du PLU, les trois autres par la RE 2020. Quel est l'intérêt de dépasser des règles déjà très performantes et onéreuses à satisfaire?
Elle contient enfin trois critères sociétaux, dans la thématique "destinations vertueuses". Comment sera défini le seuil réglementaire minimum de ces trois derniers critères, par nature subjectifs? Quelle sera la sécurité juridique des permis de construire obtenus en cas de recours des tiers? A l'inverse, comment se défendra la ville en cas de contestation d'un refus de PC ?
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